Synthèse de la 4e édition augmentée
Septembre 2014
Par Alexandre MEINESZ
Cette quatrième et nouvelle édition traduit l’engouement des lecteurs pour ce livre très abordable sur les étapes de l’origine des différentes formes de vie. Publié initialement il y a trois ans aux Etats Unis en anglais (Chicago press university : « How life Began ») puis en France aux éditions Belin et en Turquie, cette nouvelle édition française a été complétée par les très récentes découvertes sur le sujet développé et comporte 80 pages supplémentaires.
Cet ouvrage met ainsi l’accent sur les avancées de la science portant sur trois points essentiels concernant le commencement de la vie : Quand ? Où ? et Comment ?
Pour déterminer l’époque de l’apparition de la vie sur Terre et répondre à la question « quand ? » de nombreux paléontologues s’efforcent de trouver, identifier et dater les premières traces du vivant. Les publications sur ce sujet s’enchainent et la compétition internationale est grande pour trouver ces plus anciennes traces de vie. Aujourd’hui nous pouvons affirmer que les traces datées de -3,4 / -3,5 milliards d’années sont attestées et incitent à penser que la vie est apparue sur Terre vers -3,9 / -3,8 milliards d’années, datation d’autres traces plus ténues et encore quelque peu contestées. La saga de ces découvertes récentes est contée.
Pour ce qui concerne la question « où ? » il n’y a que deux hypothèses possibles : la vie se serait formée sur Terre ou la vie est venue d’ailleurs.
A la lecture des dernières recherches pluridisciplinaires effectuées sur ce sujet et en recoupant ces informations, il faut admettre que la balance penche désormais très nettement vers la dernière hypothèse. Ainsi, tous les éléments étayant l’hypothèse de bactéries contenues dans des météorites tombées sur Terre vers 3,9 milliards d’années sont présentées.
La lecture de la littérature scientifique de ces dernières années permet de constater que l’on cherche peu à valider une origine terrestre de la vie. En fait les plus grands programmes scientifiques actuels concernent la recherche du vivant ailleurs. Les envois de fusées sur Mars, sur les planètes des satellites de Jupiter et de Saturne ou sur des météorites de grande taille, se multiplient.
La découverte d’un grand nombre d’exo-planètes (qui gravitent autour d’étoiles proches) et leur examen donnent de l’espoir de trouver un environnement propice à la vie telle que nous la connaissons. Enfin nous assistons à un essor considérable de la recherche des constituants de météorites écrasés sur Terre et qui contiennent des molécules complexes constituant la vie.
D’autres recherches corroborent cette hypothèse comme celles établissant que certaines bactéries terrestres peuvent très bien survivre dans l’espace. Des lots d’organismes terrestres amenés dans la station spatiale et placés à l’extérieur plus d’un an ont survécu ! Tous les chercheurs attendent d’autres preuves pour que l’hypothèse d’une vie venant d’ailleurs soit définitivement validée.
Ce sera la plus merveilleuse des découvertes scientifiques des derniers siècles, découverte qui plongera l’humanité vers des mystères dignes des romans de fiction : quelle vie ailleurs et où ? Enfin pour répondre à la question « Comment ? », de nombreux laboratoires de chimistes des constituants du vivant se sont lancés dans un pari fou : construire la vie. Des avancées significatives sont notées mais nous sommes encore très loin d’avoir créé un être vivant capable de s’auto-nourrir et de s’auto-reproduire. Et si dans un avenir très lointain on réussira à franchir des étapes importantes dans ce registre, il conviendra de déconnecter ces découvertes des deux autres questions précédentes (Quand ? et Où ?). En effet, rien ne prouvera alors que la mécanique de montage du vivant décryptée est apparue à une certaine date sur Terre ou ailleurs.
On aura simplement mis à jour le procédé universel du montage chimique du vivant : un autre grand pas pour comprendre l’origine du vivant. Pour ce qui concerne les autres phases du développement de la vie sur Terre la recherche s’est enrichie de nouvelles découvertes qui tendent toutes à reculer dans le temps l’âge des principales innovations. Ainsi ces fossiles extraordinaires révélés il y a un an par une équipe du CNRS de l’Université de Poitier.
Les paléontologues ont trouvé des formes énigmatiques de plus de 20 cm de longueur dans des roches au Gabon. Ce sont les plus anciens fossiles d’organismes vivants visibles à l’œil nu : ils datent de plus de 2 milliards d’années. L’éditeur Belin a choisi leur image pour la couverture de cette quatrième édition.
Le fond de l’ouvrage met l’accent sur un nouveau principe à placer au dessus de l’évolution : l’Union. C’est l’union de formes pré-bactériennes (des formes virales indépendantes ?) encore inconnues qui auraient donné les premières bactéries ; c’est l’union de bactéries qui a donné 22 types différents d’organismes animaux et végétaux (ayant tous des cellules à noyau : « phymums d’eucaryotes» ), c’est enfin l’union de cellules filles qui a donné les premières « civilisations » cellulaires constituant par la suite (par évolution) la faune et la flore visibles à l’œil nu.
Trois genèses de formes vivantes distinctes où A n’a pas donné B puis C par évolution mais A+B a donné C… L’organisme C né d’union a ensuite évolué et ses descendants ont été sélectionnés par la nature comme Darwin l’a si bien décrit.
L’auteur étant spécialiste des algues, premiers organismes ayant peuplé les océans, a aussi mis en exergue le rôle fondamental des « algues bleues » qui sont en fait des bactéries contenant de la chlorophylle. C’est grâce à ces « cyanobactéries », de couleur bleu cyan, que l’oxygène est apparu d’abord dans l’eau puis dans l’atmosphère. Ce déchet de leur fonctionnement (l’oxygène de la photosynthèse) a bouleversé les premiers équilibres naturels de la planète. Ce changement global, dû a un type d’organisme, a duré un milliard d’années et a conduit à la quasi élimination des microbes se développant dans un environnement sans oxygène. Ces cyanobactéries ont été la proie d’animaux microscopiques ressemblant à nos globules blancs.
Certains ont survécu à l’intérieur de leurs prédateurs. Ces cellules hybrides, nées d’une union entre une cellule vorace (de nature animale) et une cellule passive (contenant de la chlorophylle) a donné naissance à toutes les cellules végétales classiques par évolution. Tous les végétaux chlorophylliens terrestres et ceux qui vivent sous l’eau possèdent au sein de leurs cellules des petites boites contenant de la chlorophylle, ces « plastes » ne sont que des cyanobactéries apprivoisées depuis plus de 2,8 milliards d’années. Elles contiennent encore de l’ADN typique aux cyanobactéries . Ces ex cyanobactéries apprivoisées se dupliquent en même temps que les cellules végétales pour qui elles sont indispensables. Enfin le troisième rôle primordial des « algues bleues », que l’auteur a mis à jour dans sa synthèse, est celui de l’initiation à la civilisation cellulaire.
Parmi les 22 groupes actuels de faune et de flore à cellules différentes contenant un noyau, seuls 5 sont visibles à l’œil nu. Leur architecture vient d’un mécanisme identique : une union de cellules filles constituant une civilisation de cellules et, comme dans toutes les civilisations, les individus (les cellules) se sont différenciées. Contenant les mêmes informations, les cellules souches transformées en cellules spécialisées, répondant à des ordres internes, se différencient, se distinguent devenant par exemple des cellules de la peau, des neurones, des cellules sanguines... Comme il a été établi que des fossiles d’algues bleues datant de plus de 2,5 milliards d’années ont initié les premières civilisations de cellules (fossiles de formes filamenteuses pluricellulaires aux cellules différentes), l’auteur a émis l’hypothèse que le mécanisme architectural propre a ces « algues » a été transmis qu’à 5 des 22 groupes actuels de cellules à noyau.
C’est ainsi que comme les algues bleues, les animaux, les végétaux verts, les algues brunes et rouges et les champignons se voient à l’œil nu ! Ces 5 groupes ont en commun l’organisation initiée par des cyanobactéries. Ce livre est destiné au grand public. Il est largement illustré par des dessins originaux ou provenant des principaux auteurs scientifiques qui ont fait progresser les connaissances sur l’origine de la vie ces dernières décennies. Il permet de bien classer et hiérarchiser les futures nouvelles scientifiques sur le sujet de l’origine de la vie : elles sont toujours médiatisées mais trop souvent difficiles à positionner dans le contexte général et largement pluridisciplinaire de la recherche scientifique sur l’origine du vivant. Scientifiques, enseignants, philosophes ou religieux pourront trouver dans les abondantes notes et références, (près de 800), les sources originales de la littérature internationale actualisée la plus pertinente sur les sujets développés.